Une demeure de style Art nouveau
Lieu évoqué : rue Charles Martel, Nancy.
« La nuit et une fine poussière de pluie d’automne baignaient la rue Charles Martel, parcimonieusement éclairée, lorsque Line s’y engagea. Elle avançait d’un pas énergique, décidé, un pas qui semblait heureux, légèrement dansant par instants. Sa maison était située sur la droite, en venant de l’avenue du Général Leclerc. Une maison édifiée en 1928, dans un style Art nouveau plein de charme au yeux des personnes aimant les demeures à l’architecture complexe, recherchée, aux décorations originales. La maison dont elle avait toujours rêvé, depuis qu’elle connaissait Nancy.
Elle ouvrit le portail en ferronnerie, il donnait sur la minuscule allée de gravier qui traversait un petit morceau de jardin très fleuri au printemps et en été. Elle observa la façade. Les fenêtres, aux volets encore ouverts, creusaient de hauts trous noirs sur la peinture claire. Les habitants devaient être installés dans les pièces donnant sur le jardin - le vrai.
Elle gravit lestement les cinq marches de pierre du perron, un large porte-documents dans une main, un petit sac de provisions dans l’autre. La porte en bois ouvragé, ornée dans sa partie la plus haute d’une demi-lune de vitraux fleuris - iris violets, feuillages verts, ciel jaune d’or - n’était pas verrouillée. Line pensa que de nos jours, c’était imprudent, et qu’il faudrait décidément rappeler que l’on doit toujours condamner sa porte, quelle que soit l’heure. Lorsqu’on était chez soi, à l’étage, notamment - la maison en comptait deux - entendrait-on une personne s’introduisant discrètement pour voler ne serait-ce que des broutilles ? Non, certainement pas. Et si on percevait enfin quelques sons, et surprenait le cambrioleur, il pouvait réagir avec violence. C’était tout de même inouï que Gabrielle et Romain ne puissent comprendre le danger qu’ils encouraient en se comportant si légèrement ! »
Ariane Perdigal, Nuit noire, Néreïah éditions, 2018 pp. 7-8.