Les derniers jours du four électrique de Villerupt
Lieu évoqué : Villerupt.
« Le 23 avril 1983, je suis à l’usine, et je tente de décrire les derniers jours du four électrique de Villerupt. Je me trouve dans le vestiaire, assis. Le vestiaire est au niveau du plancher de chargement du four. Derrière moi, il y a de hautes armoires grises et sales qui vibrent. Puis les douches crasseuses. On n’a pas le choix ; à la fin de la tournée, il faut y aller car on est plein de poussières. (…) Je vais voir les fondeurs qui s’agitent devant la bouche ouverte et rouge du four. Dans le jargon de ces fondeurs, ils disent qu’ils travaillent la charge d’acier. C’est un travail de titan, lorsqu’ils jettent dans le magma en fusion des pelletées de pierres minérales et autres matériaux, pour avoir un acier parfait. Maintenant, le chef d’équipe organise un autre rituel, et se prépare à la coulée. Le monstre arrête de ronronner. Le pont roulant avec sa poche vide est en face du four, pour recevoir dans une gerbe d’étincelles, l’acier en fusion à 1500° C. Les fondeurs procèdent encore à des analyses de l’acier avant de couler.
Voilà les sirènes qui hurlent, et le four bascule lentement avec son geyser en flammes. La grande poche se remplit d’acier en fusion. Le moment est solennel. »
Patrick Ponzoni, Petite histoire lorraine en passant par Villerupt-Thil et Hussigny, la route du Nord Est, Editions Claire Lorrain, 2017, p. 85.