« Les bruits, dans ma Lorraine natale, se greffent autour d’un poumon d’acier »
Lieux évoqués : Thil, Villerupt, usine de Micheville.
« Les bruits, dans ma Lorraine natale, se greffent autour d’un poumon d’acier situé après le viaduc de Thil. Bien au fond de Villerupt, je l’entends plus que je ne le vois. Ces bruits, c’est comme une bête qui souffle par moments et qui ricane entre deux. Il y a les convertisseurs Bessemer, le four orchestre particulier, auquel nous nous sommes tous adaptés. Au centre il y a l’usine de Micheville, qui respire et qui souffle sans cesse. Un bruit de fond permanent, avec des variations. Régulièrement, j’entends les trains à vapeur qui soufflent aussi puis, c’est un vacarme avec les wagons qui passent près de la maison. Il y a deux voies ferrées ; une de chaque côté de la rue.
Il y a aussi les petits bruits, comme ces gens qui vont et qui viennent dans la rue à toutes les heures. Ils ont pour la plupart un sac rond, avec leur casse-croûte dedans. C’est ce qu’ils appellent la musette qu’ils portent sur le dos, comme ils portent leur croix. Ils marchent en étant fatalistes la tête basse. En regardant le bal des hommes qui allaient et revenaient du travail, je me demandais s’ils pensaient être libres. Peut être considéraient-ils que leur destin était la résignation et le défaitisme. En attendant les vrais robots, eux ils étaient des robots humains. »
Patrick Ponzoni, Petite histoire lorraine en passant par Villerupt-Thil et Hussigny, la route du Nord Est, Editions Claire Lorrain, 2017, p. 30.