« Moi, j’ai toujours eu un faible pour Thil »
Lieu évoqué : Cité du Colonel Fabien, Thil.
« C’est vrai qu’à Thil, à la cité du Colonel Fabien, nous n’avons pas encore l’eau chaude et pour aller aux toilettes, nous traversons la rue pour les mieux lotis ; ou c’est le pot de chambre pour les autres. Pourtant, moi j’ai toujours eu un faible pour Thil. La vue sur les usines et le viaduc était imprenable depuis chez nous. Presque tout le monde a un jardin potager dans la cité. Aujourd’hui nous appellerions cela un jardin ouvrier. Nous, avec mon grand-père, on a deux potagers. Celui du haut, vers le bois et la ferme et celui du bas derrière les écuries. On a aussi un box dans les écuries où on élève les lapins et les poules. Pour nous autres, enfants, tout cela est un terrain de jeux extraordinaire.
Il y a aussi la forêt tout proche avec ses mystères et ses dangers (Obus, balles, grenades, fusils, trous de mines et rampes de fusées, casemates). Thil, c’est la guerre des boutons tous les jours, avec le danger en plus. On joue aussi parfois sur les aires de jeux des grands. Il y a le jeu de quilles en béton derrière les écuries, et le jeu de boules dans le haut de la cité. L’été, quand les femmes discutent sur les chaises devant les maisons, les hommes jouent aux boules et boivent du mauvais vin, en jurant en italien. Ceux qui ne sont pas aux boules font une scopa sur un coin de table, dans la rue. Pour moi la France c’était cela, et ça devait être partout pareil. »
Patrick Ponzoni, Petite histoire lorraine en passant par Villerupt-Thil et Hussigny : la route du Nord Est, Editions Claire Lorrain, 2017. p. 18.