Voyage de Dom RUINART
Église de Remiremont
Remiremont, situé sur la Moselle, doit son nom à l’insigne chapitre de Chanoinesses séculières. Les flammes ayant détruit, au 10° siècle, l’ancien monastère qui était sur le haut d’un mont, l’empereur Louis III le fit reconstruire dans la plaine voisine. Ce chapitre est gouverné aujourd’hui par la très haute princesse de Salm qui, ainsi que son illustre soeur, la princesse Christine, nous reçut avec les plus grands témoignages de bienveillance. Nous y restâmes quelques jours et nous y serions demeurés plusieurs autres encore, si les pressants intérêts de notre voyage n’eussent exigé notre départ. L’église est très vaste.
Un tremblement de terre l’ayant ébranlée, il y a quelques années, la princesse abbesse la fit soutenir par des piliers solides. Le pape Léon IX en a consacré lui-même le maître-autel, auquel officient seuls les sept chanoines préposés à l’instruction des vierges de la maison. Derrière cet autel, il en est un autre plus élevé, où l’on garde cinq châsses de reliques principalement de St-Romaric, etc. Là est placé le portrait de Ste-Solitrude avec le voile (Kolpostegon en grec) ou, comme on dit, l’amict pectoral et avec le manteau de chanoinesse. C’est de la même manière qu’est représentée sa statue à la porte de l’église et que figurent les abbesses sur leurs tombes. On doit conclure de là que les insignes des nonnes, qui n’existent plus du tout aujourd’hui, ont été longtemps conservées dans cette abbaye.
Dans la sacristie on garde un voile oblong dont on couvre l’autel à des jours déterminés et qu’on dit avoir été donné par le pontifie de Rome.
La croix qui a environ 7 à 8 siècles, représente l’image de Notre Seigneur Jésus Christ revêtu de ses habillements.
Le cimetière, qui est derrière l’église, renferme plusieurs tombes anciennes. Dans l’église souterraine, se trouvait jadis une chapelle assez grande, érigée en l’honneur de St-Benoît, mais les modernes l’ont profanée et l’autel est tout à fait détruit, dans la crainte que les chanoinesses ne saisissent l’occasion de se replacer sous la règle de St-Benoît.
Dom Ruinar, Voyages anciens et modernes dans les Vosges 1500 – 1870, Épinal, Éditions Veuve Durand et fils, Libraires-éditeurs, 1881, pp. 35-36
Bibliographie : Dom RUINART, (1657-1709) est un savant bénédictin de la congrégation de Saint-Maur. Disciple de Dom Mabillon, il l’accompagna à l’occasion de ses voyages en France. Un périple en Alsace et en Lorraine, effectué en 1696 lui inspira la rédaction d’un Voyage littéraire en Alsace et en Lorraine.