« Chaque année, à Bussang, une pièce pour le peuple »
Lieu évoqué : Théâtre du peuple, Bussang.
« C’était le 22 septembre 1892 ; on fêtait dans toute la France le centenaire de la république. A Paris, l’Opéra et le Français donnaient des représentations gratuites. Au chef-lieu du département, on tirait un feu d’artifice. Que faire à Bussang ?
Maurice Pottecher eut l’idée de donner une représentation et, pour être sûr d’amuser son public, il choisit Molière.
Les moliéristes égarés par hasard à Bussang cette année-là, se seraient peut-être indignés, car on s’était permis de moderniser l’inimitable, de transporter la scène du Médecin malgré lui à Bussang même parmi les bussenets et bussenettes revêtus des costumes locaux (…). Qu’on pardonne ce sacrilège, il eut un très grand succès ; la célébrité de Molière s’étendit ce soir-là sur un canton où son nom n’avait guère jusque-là pénétré. »1
Ce spectacle, joué aux lanternes sur le kiosque à musique, était modeste, mais pour son jeune metteur en scène, il fut une révélation bouleversante : on pouvait intéresser une foule d’ouvriers et de paysans avec un théâtre habituellement réservé à des lettrés, à condition que le peuple retrouve sa vie sur la scène (le jargon des paysans de Molière avait été remplacé par le patois vosgien !). Trois ans durant, cette expérience hanta Maurice Pottecher, trois années de réflexion au bout desquelles prit corps l’idée de monter chaque année à Bussang une pièce pour le peuple dans le cadre d’un théâtre populaire. »
Jacques Dufetel, Maurice Pottecher et la création du théâtre du peuple de Bussang, 1895-1914, in Patrimoine et culture en Lorraine, 1980, p. 436.
1 – Richard Auvray, Comment fut fondé le théâtre du peuple, 1899.