Étrange avant-match
Lieux évoqués : Metz, Nancy
« L’ambiance était pesante dans le minibus qui menait les handballeuses de l’université de Nancy jusqu’à Metz. Les joueuses pensaient à Stéphanie. Bien sûr, elles n’avaient pas toutes crée des liens d’amitié avec elle, mais cette absence tragique suffisait à ébranler l’esprit d’équipe qui cimentait le groupe.
– Allez les filles ! On va n’en faire qu’une bouchée de ces messines !
La prof de sport qui faisait office de coach essayait vainement d’exhorter ses troupes, mais ses encouragements sonnaient faux. Sa voix était plombée par l’inquiétude.
Assise au fond du van, Aurélie n’entendait pas les tentatives de motivation. Le front appuyé contre la vitre embuée, elle imaginait toutes les conséquences que sa révélation à la police pourrait entraîner.
Dénoncer son professeur n’était pas anodin. Surtout lorsqu’il s’agissait d’un célèbre maître de conférences en sciences criminelles, dont les manuels de droit pénal spécial étaient nationalement reconnus pour leur exhaustivité et leur pédagogie.
Et peut-être qu’après tout il n’avait rien à voir avec la disparition de son amie… Et dans ce cas, comment réagirait-il en découvrant qu’elle avait rendu public le rendez-vous nocturne entre lui et Stéphanie ? Certes, les matières juridiques ne la passionnaient guère, mais elle ressentait néanmoins l’anxiété de devoir abandonner ses études pour éviter que sa réputation d’affreuse délatrice ne lui pourrisse l’existence.
De plus, il n’était pas impossible que Stéphanie elle-même lui reproche d’avoir tout raconté aux flics. Du moins, si on la retrouvait saine et sauve… Aurélie lui avait juré qu’elle tiendrait sa langue, et il n’existait aucune raison pour que Stéphanie puisse douter de cette promesse. Cela faisait des années que les deux amies partageaient leurs cahiers intimes sans que l’une n’ait jamais trahi la confiance de l’autre. »
Lionel Behra, L’Auréole des condamnés, Rebelle Éditions, 2018, p. 71-72
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