Studio
Lieu évoqué : Nancy, non précisé
Studio
« C’est un logis perdu dans un quartier tranquille.
En entrant tu craignais de troubler le repos
d’un mort caché peut-être en des draps immobiles
et ne comprenais pas l’ombre des volets clos.
C’est un logis perdu dans un quartier tranquille
Pourtant nous eûmes joie et maints sursauts d’amour
dans le lit impérial protégé de tentures,
et dans l’obscurité du boudoir pompadour,
– Sur nous veillait sans doute une déesse impure, –
Eros, eûmes-nous joie et maints sursauts d’amour ?
Et toi, la presque vierge, évadée de l’école,
tu entres en coup de vent :
sur le sopha, – vite ! L’heure sonne, –
tu viens perdre la tête entre deux cours de chant,
Claudine presque vierge, évadée de l’école.
Et toi, dont le regard est d’or au coin du feu,
toi qui aimes ce nid pour y rêver à l’aise,
tu parcours un Verlaine ou copies un Helleu,
lasse de rabâcher la grammaire française,
amies au regard d’or, le soir, au coin du feu…
C’est un logis perdu dans un quartier tranquille
Ô dames, qui passez dans ce lieu maudit,
préparez vos remords à d’insignes prières ;
mais avant de songer au futur paradis,
jouissez l’heure brève, en riant des chimères,
Ô dames, qui passez dans ce saint lieu maudit ! »
A. Michel-André, Studio, Nancy universitaire, novembre 1910, p. 44