Voyage à Plombières en 1808 – Sarah Newton
Le Prieuré d’Hérival
Hier, nous sommes parties dès le matin avec M. de la Vieuville et le major, en char-à-bancs, pour aller voir la forêt de sapins, qui est à trois lieues d’ici. La pluie nous a empêchés [sic] de dîner sur l’herbe, mais non pas de nous promener sous les arbres verts et tristes qui offrent une couverture si épaisse, où l’on est à l’abri de l’eau comme du soleil ; mais décidément c’est trop noir. La pluie ayant cessé, nous avons pu descendre, comme dans une cave, au fond d’une vallée, pour voir un petit lac au bord duquel sont les ruines d’une ancienne abbaye qui s’appelle Hérival, et dont les moines avaient bien choisi l’emplacement, pour venir là, loin du bruit et du mouvement, oublier le monde et ses vanités. Jamais je n’ai vu rien de plus silencieux ni de plus triste que ces vieux murs couverts de ronces, au milieu de cette forêt noire, et cependant je comprends qu’on puisse vivre dans de tels endroits et même s’y plaire. Nous avons mangé un dîner froid dans un cabaret, et nous sommes rentrées à Plombières avec la pluie, et un peu brisées par les cahots du char-à-bancs.
Sarah Newton, « Voyage à Plombières en 1808 » dans Voyages anciens et modernes dans les Vosges 1500 – 1870, Épinal, Éditions Veuve Durand et fils, Libraires-éditeurs, 1881, pp.139
Bibliographie : Sarah NEWTON (1789-1850), comtesse Desttut de Tracy. Demoiselle de compagnie de la marquise de Coigny, elle tint un journal de voyage.